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"Séropositive depuis 15 ans, je vis grâce aux médocs", extrait d’Alter Ego numéro 75

Publié le 23 janvier 2014

On ne meurt plus du VIH, on vit avec. Mais justement, qu’est ce qu’une vie sous traitement à vie ? Pour ce numéro spécial d’alter ego, lié à la journée mondiale de lutte contre le sida, nous avons pu recueillir le témoignage d’une patiente du CSAPA. N. 50 ans, a été contaminée dans les années 1990. Elle revient, dans cet entretien, sur l’histoire de sa maladie, elle nous raconte comment le VIH est intimement lié à son ordinaire et comment elle tient grâce aux médocs et au soutien du CSAPA.

(...)

Bonjour N., peux-tu nous raconter à quelle occasion tu as découvert ta séropositivité ?

J’étais en couple avec mon mari, lui avait appris qu’il était séropositif donc je me doutais que je l’avais aussi mais j’étais incapable d’aller me faire dépister, j’étais dans le déni,je m’occupais de lui. Je travaillais, tout cela était déjà très lourd. Petit à petit j’ai eu des maladies de peau, je perdais mes cheveux.J’ai fait un test en laboratoire mais ne suis pas allée chercher les résultats.Je pense que je savais très bien que j’étais contaminée mais j’étais incapable de l’assumer.

Qu’est-ce qui a déclenché alors le début de la prise en charge ?

Je suis tombée gravement malade, direct une pneumocystose, et me suis retrouvée hospitalisée en réanimation. C’était la seule façon d’être confrontée à ça, de l’assumer et ça a aussi permis de le dire à mes proches.

Est-ce qu’il y avait beaucoup de cas alors dans ton entourage ?

Non je n’étais pas dans le milieu des injecteurs de drogue. J’en prenais mais je n’injectais pas. J’ai été contaminée lors de rapports sexuels, c’est sûr, on a pris des risques.J’étais suivie dans un centre pour toxicomanes où par contre je voyais des gens visiblement très malades. C’était très violent. A l’époque,on ne savait pas encore grand-chose, et tout ça faisait très peur, le SIDA c’était la mort.

Comment et où étais-tu suivie ?

En 1997, après trois mois en réanimation,je suis passée dans un service de pneumologie,c’est un souvenir horrible, j’étais traitée comme une merde. Et d’un seul coup ils m’ont virée, car je n’avais pas assez cotisé donc je n’avais plus de Sécurité sociale. Ensuite, de retour à la maison, j’ai eu très vite d’autres problèmes, un comportement bizarre, je me cassais la figure tout le temps. On m’a ramenée aux urgences où j’ai passé une IRM, j’avais une encéphalite. Là j’ai pris pour la première fois l’AZT mais j’ai fait une allergie donc j’ai eu une trithérapie lourde avec plein d’effets secondaires.En quelques semaines j’avais le corps d’une vieille. Je n’étais pas du tout bien reçue ni écoutée, je ne me sentais pas respectée. A l’époque, séropo + toxico, t’étais étiquetée immédiatement « emmerdeuse ». Les soignants avaient des a priori horribles. Même pour comprendre la maladie j’allais à la pêche aux infos, j’ai lu les magazines spécialisés, et des bouquins. Un jour, un copain séropo m’a conseillé de changer d’hôpital et j’ai atterri à Cochin. Là, j’ai testé beaucoup de traitements avant de trouver celui qui me convenait. A l’époque j’avais aussi le soutien de l’association Aides, ils m’ont beaucoup aidée au moment du retour à domicile, j’avais une aide ménagère et un kiné gratuitement. Malheureusement je crois qu’il ne font plus ça maintenant,ou peut être pour les cas plus graves que moi.

Est-ce que tu es passée par des périodes de découragement ?

Non pas vraiment, je ne suis pas du genre à lâcher l’affaire. J’en ai testé des médocs. Bon là en ce moment je fais une pause. Ca fait quinze ans que j’en prends, or moi les medocs j’ai toujours détesté ça. Je fais un break pour mieux réattaquer.

Et en cas de coup dur, qu’est ce que tu fais ?

Je pleure un bon coup, je mets la musique à fond, je gueule et voilà, ça soulage.Mais aussi le fait qu’on soit dans la même situation avec mon mari, ça nous aide, on se soutient l’un l’autre.Si j’avais été célibataire à l’époque je serais morte.

A quoi ressemble ton suivi actuel ?

J’ai la chance d’avoir un médecin adorable qui me connait bien, que j’aime beaucoup, j’ai même son portable pour l’appeler quand ça ne va pas.Aujourd’hui c’est elle qui a programmé une hospitalisation pour que je puisse faire de la rééducation.

Et les contraintes liées au traitement que peux-tu en dire ?

Alors il faut prendre son traitement très régulièrement, voir ton médecin tous les trois mois, il y a aussi les analyses de sang. Faut être carré quoi.

Est-ce qu’il t’arrive d’informer ou de mettre en garde d’autres personnes ?

A fond, je ne me cache pas et j’en parle souvent. Je leur dis que c’est une galère et qu’il ne faut pas niquer sans capote.Et surtout, si on est séropo, faut prévenir les autres : en cas de contact avec mon sang il faut que les autres puissent faire attention. Combien de gens vont chez le dentiste sans dire qu’ils ont le Sida, alors que c’est hyper risqué ? C’est inconscient. C’est la moindre des choses quand t’es malade, faut dire aux autres« attention ! »

Les messages actuels sont-ils adaptés ?

Le problème c’est que les jeunes entendent parler de trithérapie, donc ils pensent qu’il y a des traitements efficaces et ils ont moins peur. C’est bon on peut se soigner, donc ils ne mettent pas de capotes. C’est complètement con. La trithérapie c’est lourd. Moi je pense qu’il faudrait au contraire leur faire beaucoup plus peur. Alors les belles rencontres en boite de nuit c’est la vie,c’est joli... mais non, on ne fait pas l’amour sans capote, c’est tout !

Le VIH fait-il toujours peur ?

Pour les gens de ma génération et les parents oui, mais les gamins ils sont inconscients et y a des chiffres qui montrent que beaucoup font l’amour sans capote.

Comment inciter des gens au dépistage ?

Le problème c’est qu’il faut être capable d’encaisser la nouvelle. Pour moi c’est un souvenir de cauchemar, on m’avait proposé de m’accompagner au dépistage, j’étais entourée et tout mais au fond je savais déjà que je l’avais et c’est pour ça que je fuyais.

Y-a-t-il des interactions entre la substitution et les trithérapies ?

Oui malheureusement. Les trithérapies font que le foie élimine plus vite la Méthadone donc on est plus vite en manque et il faut augmenter les doses. Moi je ne voulais pas, j’ai lutté mais j’étais tellement en manque que je n’ai pas résisté longtemps. Et aussi il faut la prendre en plusieurs fois. Avant j’avais deux prises de metha par jour, maintenant trois. C’est dur parce que j’aimerais baisser mais ce n’est pas possible. Parfois j’en ai ras-le-bol. J’ai honte même d’avoir augmenté la metha, vis-à-vis de mon entourage, ils ne comprennent pas car je leur dis que je ne me défonce plus. Et puis j’ai l’impression que je ne pourrai jamais arrêter.

Est-ce qu’au CSAPA tu trouves un soutien supplémentaire dans la prise en charge du VIH ?

Oui, je suis très bien suivie ici.

Et l’hôpital prend-il en compte le suivi addictologique ?

Aucun problème, ils voient bien que je ne déconne pas, il n’y a plus de problème vis-à-vis de ça.Et l’avenir ?Le boulot pour l’instant j’ai lâché, je ne fais pas de projet à ce niveau là.Mon projet de vie dans ma tête c’est une remise en forme dans ce service de rééducation, après je verrai, je ne fais jamais trop de projets à long terme…Ah si, je voudrais voyager, retourner un jour en Asie.

Sur quel message fort veux-tu terminer ?

C’est pas parce que les trithérapies sont là que le SIDA c’est fini. C’est trop dur soit physiquement soit moralement. C’est impossible que des personnes se contaminent encore bêtement. Il faut en parler le plus possible. Moi d’ailleurs ça m’aide beaucoup d’en parler, la communication c’est essentiel, ça soulage. Si des gens me critiquent aujourd’hui je m’en fous, je me sens intègre.

Propos recueillis par Claire NOBLET chef de service du CSAPA



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